Pourquoi CS Lewis a écrit « L’abolition de l’homme ».

Lien vers l’article original en anglais.

[NdT. Lewis, dont le rapport très ambivalent avec la chrétienté est très bien décrit par Miles Mathis dans un article en anglais ici, substitue dans les citations ci-après le concept de Logos par celui du Tao, histoire de rester dans son rôle de défenseur de la Révélation sans lui faire trop de pub. A part ça, le texte est bien écrit.]


Pourquoi CS Lewis a écrit « L’abolition de l’homme »

James A. Herrick

22 août 2020 à 07h57

Note de l’éditeur : Publié le 16 août 1945, That Hideous Strength de CS Lewis est un roman dystopique qui reflète étrangement les réalités de 2020, mettant dans une forme fictive mémorable des idées exprimées dans l’œuvre de non-fiction de Lewis, The Abolition of Man. Pour marquer les trois quarts de siècle du livre cité en premier, Evolution News présente une série d’essais, de réflexions et de vidéos sur ses thèmes et son héritage.

James A. Herrick a été le professeur de communication de Guy Vander Jagt au Hope College à Holland, MI. Ses livres incluent The Making of the New Spirituality: The Eclipse of the Western Religious Tradition.

Cet article est adapté du chapitre 10 de The Magician’s Twin: CS Lewis on Science, Scientism, and Society , édité par John G. West. Voir également :

De profondes inquiétudes quant à l’orientation de l’éducation et de la science occidentales ont incité CS Lewis à rédiger ses trois conférences, publiées pour la première fois sous le titre The Abolition of Man en 1944. Dans son troisième discours, Lewis a fait valoir que le pouvoir d’affecter toute l’histoire ultérieure de la race humaine sera déterminé par quelques technologues et planificateurs bureaucratiques qui modifieront les composantes fondamentales de la biologie humaine. 

Les trois brefs chapitres constituant L’abolition de l’homme – «Les hommes sans poitrine», «Le chemin» et «L’abolition de l’homme» – ont été initialement présentés dans le cadre des conférences commémoratives de Riddell à l’Université de Newcastle en février 1943. Dans sa conférence la plus discutée et celle dont le livre tire son titre, Lewis avertit que «si un âge atteint vraiment, par l’eugénisme et l’éducation scientifique, le pouvoir de faire de ses descendants ce qu’il veut, tous les hommes qui vivent après lui seront les patients de ce pouvoir. » Loin d’être des humains plus libres et meilleurs, ces nouvelles créatures seront «plus faibles, pas plus fortes : car malgré que nous aurons mis de merveilleuses machines entre leurs mains, nous aurons prédéterminé comment ils devront les utiliser». 1 Grâce à une biotechnologie sophistiquée, «la conquête de la nature par l’homme, si les rêves de certains planificateurs scientifiques se réalisent, signifiera le règne de quelques centaines d’hommes sur des milliards et des milliards d’hommes.» Lewis conclut: «La dernière étape adviendra lorsque l’homme, par l’eugénisme, par le conditionnement prénatal, et par l’éducation et la propagande basées sur une parfaite psychologie appliquée, aura obtenu le plein contrôle de lui-même. La nature humaine sera l’ultime élément de la nature à obéir à l’homme. La bataille aura été gagnée.» 2

Une profonde méfiance

La profonde méfiance de Lewis à l’égard des projets éducatifs modernistes, le subjectivisme de la moralité et le progrès de la planification scientifique sont au coeur de ces conférences. Il était particulièrement inquiet de l’expérimentation biotechnologique dont l’humanité serait le «patient», une possibilité qu’il a également explorée dans That Hidous Strength. Dans ses deux œuvres, Lewis dresse un sombre portrait de la race humaine repensée par des programmeurs scientifiques qui se seraient éloignés du Tao.3 Si un tel projet réussissait, chaque être humain serait finalement le reflet dans ses cellules mêmes d’une nouvelle nature élaborée par des technologues. La nouvelle nature humaine serait le reflet d’une vision morale fondée sur des mythologies populaires mais essentiellement non soumises au sens critique telles que le progrès et l’évolution, des récits façonnant la planification scientifique elle-même. Lewis a écrit ces mots célèbres : «Car le pouvoir de l’homme de se faire ce qu’il veut sera le pouvoir de certains hommes de faire d’autres hommes ce qu’ils veulent. » 4 Ces «mouleurs d’hommes du nouvel âge seront armés des pouvoirs d’un état omnicompétent et d’une technique scientifique irrépressible : nous aurons une race de conditionneurs qui pourront vraiment façonner la postérité selon les formes qu’ils chosiront.» 5

Pour les conditionneurs – la dénomination de Lewis des scientifiques et des bureaucrates à l’oeuvre sur la nouvelle humanité – les valeurs et les émotions seront de simples phénomènes physiques à produire ou à réprimer chez les étudiants grâce à une éducation éclairée par une psychologie avancée. En rupture avec les traditions du passé, les valeurs deviendront un résultat éducatif à propager plutôt qu’une conscience morale profondément enracinée à affiner, «le produit, et non le motif, de l’éducation». Les conditionneurs acquerront la capacité de «produire de la conscience et de décider quel genre de conscience ils produiront». 6

Les futures élites académiques et gouvernementales définiront le «bien» et pour ensuite inculquer ce bien inventé à l’humanité par une combinaison de technique éducative et de biotechnologie. Selon Lewis, ils «savent très bien comment fabriquer une douzaine de conceptions différentes du bien en nous», sans qu’eux-mêmes ne soient guidés par aucun standard externe et objectif du bien. Ignorant l’intemporel Tao, les conditioneurs deviendront les arbitres du bien et du mal. 7 Mais, pour Lewis, sortir du Tao c’est rompre son lien moral avec toute l’expérience humaine passée, en substance, cesser d’être humain. Propager cette rupture morale par des moyens technologiques, c’est créer, non pas une race humaine améliorée, mais une race qui n’est plus humaine; c’est l’abolition de l’homme.

Demain , «CS Lewis, Science et Science Fiction».

Références

  1. CS Lewis, L’abolition de l’homme (New York: Macmillan, 1947), p. 36. 
  2. Ibid., 37.
  3. Lewis fournit aux lecteurs une formulation du Tao en annexe à L’abolition de l’homme .
  4. Lewis, Abolition of Man , 37.
  5. Ibid., 38.
  6. Ibid., 39.
  7. Ibid., 39.

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