Comme promis. C’est un peu technique, ce qui vous permettra de briller dans les conversations, mais toujours très humoristique – apprendre en s’amusant! Encore trois parties…
J’en profite ici pour annoncer une série que je suis en train de rédiger en anglais pour mes amis américains et le lectorat anglophone sur Substack, qui apprécient beaucoup mes commentaires – nul n’est prophète en son pays. J’en publierai évidemment la traduction française sur ce blog. Je m’y adresse à la définition des mots les plus employés dans le narratif et le contre-narratif. Ça touillera un peu les neurones de ceux qui les emploient sans trop y réfléchir. C’est le but.
Je cesse à partir de maintenant de joindre le texte original de l’article, qui peut être facilement trouvé en suivant le lien vers la source. Essayez ici:
La température du Royaume-Uni au cours des 100 dernières années (2ème partie)
Un coup d’oeil sur les maxima et minima quotidiens au cours des 100 dernières années. La situation empire-t-elle, et que signifie « empirer »?
John Dee
5 septembre
Je suis en train de contempler une feuille de calcul Excel de toutes les données que j’ai pu extraire de cette pratique ressource en ligne du Bureau Météorologique. Si un abonné payant souhaite en obtenir une copie, n’hésitez pas à le demander – j’aime à penser que je vous en donne pour votre argent! [NdT. c’est un article payant]
Présentation de Tmax
Commençons par Tmax, qui est défini comme suit:
Les données de nos stations historiques sont les suivantes
- Température maximale quotidienne moyenne (tmax)
- Température minimale quotidienne moyenne (tmin)
- Jours de gel atmosphérique (ga)
- Pluviosité totale (pluie)
- Durée totale d’ensoleillement (soleil)
Pour que tout le monde comprenne bien la manière dont on obtient Tmax, la température maximale absolue de chaque station est notée quotidiennement et, à la fin de chaque mois, quelqu’un calcule la moyenne arithmétique de ces relevés. Tmax n’est donc pas un enregistrement des températures les plus chaudes enregistrées à chaque station et, pour être honnête, il est assez stupide de présenter ces données au grand public, à moins que celui-ci ne soit un fervent adepte de la propagande climatique.
C’est une absurdité pour plusieurs raisons, à commencer par la réalité analytique selon laquelle les extrêmes, quels qu’ils soient, sont considérés comme des valeurs aberrantes par les statisticiens qui les rejetteront et/ou les remplaceront par des estimations interpolées, modélisées ou lissées. Ensuite, il y a la réalité technique qui veut qu’un nouveau record soit détenu pendant moins d’une minute (en fonction de la résolution de l’échantillonnage et de la procédure automatisée de contrôle de la qualité). Ensuite, il y a une dimension comique lorsque quelqu’un fait quelque chose d’inhabituel à proximité de l’abri Stevenson [NdT. voir sur Wiki], comme par exemple y garer un camion de crème glacée [NdT. l’article en lien est assez désopilant, je le traduis si intérêt]. Enfin, il y a la dimension surréaliste qui consiste à placer son thermomètre à un endroit réellement stupide:

Quand on parle « d’effet de serre », je n’aurais pas cru que le Bureau Météorologique l’aurait pris au mot.
En prenant la moyenne de plusieurs mesures de la température maximale quotidienne à un endroit spécifique, on élimine les effets des valeurs aberrantes générées par les camions de crème glacée, les serres ventilées et d’autres sources de chaleur localisée, de sorte que l’on peut commencer à deviner le comportement réel du temps. Cette approche permet d’obtenir de meilleures statistiques, mais elle ne se prête assez peu à la publication de gros titres alarmants.
Il faut également garder à l’esprit qu’il est possible de continuer à enregistrer des températures quotidiennes record sur une planète qui refroidit. Cela se produit si la variabilité climatique augmente alors que les températures diminuent. Les statisticiens donnent à ce phénomène un mot fantaisiste, très utile lors des apéritifs, à savoir hétéroscédasticité. Consultez cette entrée Wiki, puis essayez de glisser quelque chose comme « apparemment, tout est dû à l’hétéroscédasticité et non à notre SUV, chérie » en dégustant des amuse-gueule.
En résumé, la température maximale quotidienne moyenne, aussi appelée Tmax, est une valeur tout à fait convenable qui donne une image plus fidèle que celle de la société météorologique qui présente à la télévision ses effrayantes cartes thermiques rouges et noires.
Stations d’eau chaude et froide
Ce que nous allons faire à présent, c’est choisir une période pendant laquelle les 37 stations de l’échantillon du Bureau Météorologique ont recueilli simultanément des données de température maximale quotidienne afin de pouvoir les comparer. Comme indiqué dans les newsletters précédentes, Cwmystwyth, Ringway et Southampton ont fermé il y a un certain temps, donc nos 37 stations doivent devenir 34 (alias UK34). Camborne a été la dernière station à démarrer en septembre 1978, donc notre première année complète pour le UK34 est 1979. Si nous faisons maintenant la moyenne des séries mensuelles de la température maximale quotidienne moyenne sur la période 1979 – 2021, nous obtenons une seule grande moyenne pour chacune des 34 stations étudiées. Voici à quoi cela ressemble sous forme de graphique:

Il fait froid en Écosse (sans surprise) et Heathrow remporte la palme de la station la plus chaude (sans surprise non plus). Avant de transformer les données UK34 tmax en une anomalie à l’échelle du Royaume-Uni, je vais prendre l’aéroport super chaud d’Heathrow et le comparer à l’aéroport super froid de Wick, par curiosité.
La bataille pour la planète des aéroports
Heathrow a installé son premier thermomètre en 1948, notre histoire doit donc commencer à cette date. Ce qui m’amuse, c’est lorsque les têtes parlantes du Bureau Météorologique déclarent qu’un nouveau record de température au Royaume-Uni a été établi à Heathrow, ce qui signifie « le plus chaud depuis le début des relevés ». Suit généralement une deuxième phrase (séparée de la première) indiquant que les relevés ont commencé en 1853. Ces deux affirmations sont intrinsèquement vraies, mais un public crédule et peu habitué à la supercherie journalistique sautera sur l’hypothèse erronée d’une série de données contiguës à Heathrow remontant à 170 ans. En réalité, nous n’avons aucune idée de la chaleur qu’il faisait à Heathrow pendant la canicule de 1947!
Examinons donc les tmax pour Heathrow et Wick pour la période 1948 – 2021:

Ces lignes vertes ondulées sont un de mes outils préférés, les fonctions LOESS (Locally Estimated Scatterplot Smoothing) [Lissage du nuage de points estimé localement], aussi appelées régression locale. Elles nous en disent beaucoup plus que les lignes droites produites par la Régression Linéaire, mais j’utiliserai cet outil plus tard. Nous pouvons voir que Heathrow est plus chaud que Wick, ce qui n’est pas surprenant quand on sait où se trouve l’aéroport de Wick par rapport à Heathrow…

Et quand on compare le niveau de développement urbain…

Ce qui m’intéresse davantage, c’est que les deux endroits montrent des premiers signes de refroidissement entre 1948 et 1965 environ. Comment cela est-il possible si les émissions de combustibles fossiles ont explosé pendant le boom de l’après-guerre? La réponse simple est que le climat est bien plus complexe que ce que les activistes voudraient vous faire croire; je fournirai la réponse complète au cours de quelques newsletters à venir.
La petite clé à molette
Cela nous laisse avec une reprise tardive du réchauffement à partir de 1965. Si ce phénomène est évident dans les deux aéroports, il l’est beaucoup plus à Heathrow, ce qui est probablement dû au développement urbain. Ce que je vais faire à présent, c’est prendre une de ces régressions linéaires (alias la petite clé) et établir la tendance au réchauffement pour 1965 – 2021 pour les deux aéroports. Ci-joint deux portions de résultats de statistiques:


Les détails se résument ici à une tendance linéaire au réchauffement estimée à 0,039°C par an pour Heathrow (p<0,001) et à 0,021°C pour Wick (p<0,001), ces deux valeurs étant statistiquement très significatives. Il s’agit d’estimations ponctuelles limitées par l’erreur et nous pouvons donc effectuer un test t sur des échantillons indépendants pour vérifier si les deux taux sont significativement différents compte tenu de leurs erreurs types associées. Je suis heureux de confirmer ce que nous avions déjà deviné, à savoir que les deux taux de réchauffement sont effectivement significativement différents (p=0,003, variances égales non supposées).
Un premier aperçu de l’ICU
Nous pouvons attribuer cette différence à l’effet d’îlot de chaleur urbain (ICU). Toutes nos stations météorologiques terrestres sont affectées par l’ICU, mais vous n’en trouverez pas beaucoup de mention dans la littérature ou à la télévision. Le Bureau Météorologique fait une brève et très vague allusion à l’ICU lorsque le préposé à la météo dit « il fera plus chaud pour ceux qui vivent dans les villes » ou « il fera plus froid pour ceux qui vivent dans les zones rurales », ou des formules du même genre. Nous nous retrouvons donc à vivre dans une réalité parallèle où l’ICU est imputée au changement climatique plutôt qu’à une jungle de béton, d’acier, de fer, de briques, de goudron et de sources de chaleur localisées.
Pour en revenir à notre paire de coefficients, nous constatons que Heathrow se réchauffe plus vite que Wick, à raison de 0,018°C par an ou 1,8°C par siècle. Ce qui me fait froncer les sourcils, c’est que ce chiffre est supérieur au taux de réchauffement global estimé à 1,5°C par le Groupe d’experts Intergouvernemental sur l’Evolution du Climat (GIEC) lorsqu’il a publié le Rapport Spécial SR15. La question qui se pose est la suivante: sommes-nous en train de nous faire balader en ville?
Regardons vers le haut et vers le bas
Nous pouvons tenter de répondre à cette question en regardant les données satellitaires recueillies depuis 1979 (nous y reviendrons dans les prochaines newsletters) et en examinant de plus près l’état de nos stations météorologiques terrestres (nous y reviendrons dans les prochaines newsletters). Pendant que le four est encore chaud, nous pourrions aussi jeter un coup d’œil à ce qui se passe à la seule station de Wick depuis qu’elle a commencé à recueillir des données en 1914:

Ai-je bien entendu un « ouh » ou un « woah », ou peut-être un discret « WTF » [NdT. What The Fuck?] dans votre voix? J’ai en tout cas recraché mon café lorsque j’ai constaté l’augmentation spectaculaire des maxima de température après 1930. Je pense que nous pouvons deviner pourquoi. Je vous fiche mon billet que Wick n’était au départ qu’une bande de gazon avec un mât de drapeau et une cabane en bois entre 1914 et 1929, avant de devenir une base aérienne goudronnée et couverte de cabanes Nissan, avec de nombreux toits en tôle ondulée et des abris en béton. Nous pourrions appeler cela l’effet d’îlot de chaleur militaire (ICM), qui a apparemment été responsable d’une augmentation de ~1,0°C de la température maximale en l’espace de deux ans. Voilà ce que j’appelle un réchauffement!
Combien d’autres stations météorologiques cachent un squelette similaire dans leur placard de Stevenson? Quelle est l’importance de l’ICU dans la vie réelle (par opposition à la vie virtuelle de la communauté de modélisation de l’ICU). Maintenant que nous avons vu à quel point les choses peuvent osciller, quelle confiance pouvons-nous avoir dans le fait que tout abri Stevenson à portée de voix d’un quelconque aménagement enregistre le comportement réel du climat plutôt que celui d’une feuille de tôle ondulée ou d’un bloc de béton?
Alors… quelle part de l’augmentation observée depuis 1980 peut être attribuée au changement climatique et quelle part au développement continu de Wick, avec l’augmentation du nombre de passagers et d’autres activités? Je vais tenter de répondre à cette question dans le cadre d’une étude transversale que j’ai prévue pour les stations UK34.
Un climat plus froid?
Avant de quitter cette diapositive, il convient de noter que la période de 70 ans de l’aéroport de Wick, qui s’étend de 1933 à 2002 environ, est plutôt stable. Étant donné que l’utilisation et le développement de l’aéroport ont progressé pendant cette période, je dois logiquement en déduire que le climat s’est probablement refroidi à cet endroit. Je ne suis pas sûr que les activistes apprécieront beaucoup cette découverte, alors nous ferions mieux de procéder à une vérification avec un peu de régression linéaire:

Et voilà – nous avons un taux de réchauffement de 0,001°C par an qui est totalement et complètement insignifiant du point de vue statistique (p=0,829). Comment est-il possible que nous soyons incapables de détecter un réchauffement dans les températures maximales quotidiennes enregistrées sur une période de 70 ans à cet endroit? Ouvrez la boîte à biscuits car la partie 3 est en préparation…
Mettez la bouilloire sur le feu!
[NdT. pour faire le thé, John est citoyen britannique 😉 ]